Production de sirop d'érable et de champignons.

Lors de notre récent passage dans la région du Bas-St-Laurent et du Témiscouata, des acériculteurs nous informaient que la production de sirop d'érable était du tiers de ce qu'elle avait été les années précédentes.

Pour une bonne récolte de sirop d'érable, deux conditions sont requises:

-des conditions favorables à la coulée, soit des nuits sous le point de congélation et une température de jour au-dessus du point de congélation, sans être trop chaude,

-l'été qui précède la récolte doit être favorable à la croissance des arbres avec un bon ensoleillement et des pluies régulières maintenant un bon niveau d'eau dans le sol, soit les mêmes conditions que celles requises pour avoir un beau jardin.

La production des sucres du sirop se fait dans le feuillage des érable au cours des mois de juillet et d'août et ces sucres sont accumulés dans leurs racines tout au long de l'été, Ce sont ces sucres qui remontent dans les troncs le printemps suivant pour faire croître le feuillage, ajouter un nouvel anneau de bois au tronc et, au passage, donner une coulée de sirop.

Lors de notre visite dans le Bas-St-Laurent et au Témiscouata, plusieurs questions nous ont été posées concernant la très décevante coulée du printemps 2018.

Or, au cours de l'été 2017, le Témiscouata et le Bas-St-Laurent ont subi une sécheresse exceptionnelle qui a persisté jusqu'en septembre et qui a grandement nui aux agriculteurs dans  la production des fourrages et des céréales. C'est la même chose pour les érables; si la production des fourrages va bien, on peut anticiper une bonne production de sirop d'érable le printemps suivant. Au printemps 2018, les érables n'ont pu donner ce qu'elles n'avaient pas. Si on superposait une carte des mauvais rendements agricoles en 2017 à une carte des mauvais rendements dans la production de sirop d'érable en 2018, il y aurait très probablement une forte corrélation.

Les bourgeons des feuilles se forment également au cours des mois de juillet et d'août. Les mauvaises conditions de l'été 2017 feront que le feuillage de 2018 sera moins luxuriant donnant une production de sucres plus faible, ce qui se répercutera sur la production du printemps 2019 qui sera probablement plus faible que la moyenne. Concernant l'accumulation des réserves et la montée de la sève, il faut considérer les facteurs suivants:

-c'est connu que les plantes et les arbres accumulent dans leurs racines des réserves importantes d'éléments nutritifs pour la saison à venir; la montée de la sève dans les troncs est aussi rendue possible grâce à ces deux facteurs:

-la sève gèle (ou dégèle) à une température inférieure au point de congélation, ce qui lui permet de circuler dans les tubes du bois, même si le sol autour des racines en surface est encore sous le point de congélation,

-au printemps, le sol dégèle en partie grâce à la chaleur qui monte du centre de la terre; ainsi, le dégel du sol en profondeur s'amorce souvent avant le dégel de surface. À certains endroits, cet apport de chaleur provenant du centre de la terre est suffisamment important pour que le sol ne gèle jamais.

La fructification des champignons forestiers suit exactement le même modèle. Non seulement, il n'y a pas de fructification une année de sécheresse, mais les années qui suivent verront une plus faible fructification, car les champignons associés aux racines des arbres doivent accumuler des réserves, souvent sur plusieurs années, pour donner une fructification abondante.

Fernand Miron, biologiste